Salut les gens !
En apportant mon témoignage, j’espère vraiment apporter un peu d’optimisme dans vos lamentations sur le triste constat (on s’accorde toutes à constater toutes les mauvaises raisons de s’épiler, mais on n’arrive pas à franchir le pas à cause de la pression sociale).
Je suis une jeune femme de presque 21 ans ayant définitivement boycotté l’épilation. M’étant épilé aisselles, jambes et maillot (sous-entendu au sens originel du terme: ce qui dépasse du maillot) pendant environ 8 ans uniquement par pure convention sociale, je détestais m’épiler mais le faisais uniquement pour le résultat, car effectivement j’avais intériorisé la norme et m’était trouvé de bonnes raisons pour y adhérer (les sacro-saintes "hygiène" et "esthétique"), faute de courage. Puis j’ai découvert le site de Pierre Griffet pour le droit à la non-épilation en mars.
http://pgriffet.voila.net/PF.htm
Je l’ai lue en entier, avec passion et émerveillement, j’ai obtenu la preuve (en me renseignant également auprès d’autres personnes du métier de la santé) que le poil est hygiénique, et que pour le reste (mais ceci, je le savais plus ou moins) la rage dépilatoire n’avait jamais connu autant d’ampleur sinon dans notre société actuelle (sauf peut-être justement chez les musulmans et les Indiens d’Amérique). J’avais ainsi toutes les bonnes raisons du monde de m’arrêter de m’épiler, et tous les arguments en main pour parer à d’éventuelles attaques. J’ai pris une soirée pour en discuter avec mon fiancé, Indien (mais d’Inde!), qui n’en a été nullement dérangé, précisant qu’en Inde peu de femmes s’épilent, et souvent, uniquement les bras, et que personne ne le faisait dans sa famille (j’ai d’ailleurs trouvé des photos de famille à la plage où l’on voit les jambes poilues de sa sœur, et justement, rien à voir avec les jambes masculines qui l’entourent!). Il s’est accordé sur le fait que c’était une perte de temps et d’argent, qu’à la place on pourrait faire tellement d’autres choses passionnantes, et que si les poils étaient toujours présents sur le corps humain (il a également étudié les sciences), il y avait une raison à cela (il m’a bien expliqué le rôle régulateur de la transpiration, d’où une très forte pilosité en Inde où le climat humide entraîne une transpiration plus abondante). Je comptais arrêter en hiver car du point de vue de la pression sociale, c’était la période la plus favorable pour arrêter. Néanmoins, une séance d’épilation coûteuse, douloureuse et saignante (oui, j’ai saigné des aisselles…) précédant nos fiançailles m’a fait prendre conscience de la nécessité d’arrêter le plus vite possible. Mon fiancé était si triste que je me sois torturée à ce point-là, et de voir mes jambes, aisselles et les contours de la culotte si rouges, alors qu’ils trouvaient mes poils en légère repousse "cute". J’ai donc définitivement arrêté depuis ce jour, et n’ai pas regretté mon choix, bien au contraire, d’autant + que mon fiancé me préfère à présent ainsi
Je n’y ai trouvé que des avantages, les mêmes que ceux qu’ont mentionné les femmes ayant mis un terme à cette pratique: douceur et hydratation de la peau (plus besoin de lait et de crèmes), absence de douleur, gain de temps et d’argent, réduction extrême de la transpiration, en particulier dans les zones censées transpirer moins (dos), réduction des mauvaises odeurs sous les aisselles également, augmentation de la production de phéromones libérant des odeurs très sensuelles au cours des actes sexuels (je les sentais moins auparavant car le pubis est plus éloigné du nez que les aisselles) et surtout, décuplement de mon estime de moi-même
Et non, même si je m’attendais à subir de nombreuses remarques désobligeantes, il n’en est rien: je me rends au travail en robe sans manches et arrivant au genoux, je sors en boîte en robe et me fais draguer quand-même (voire plus qu’avant), et pourtant, je n’ai subi qu’une seule remarque négative en 2 mois: celle d’une amie, justement, femme, alors que la plupart des amis de sexe masculin (autrement dit, tous ceux qui sont au courant car ils m’ont vue au cours des deux derniers mois) me soutiennent même dans ma lutte pour le droit à la non-épilation, l’un d’entre eux ayant récemment qualifié mon combat d’"intelligent". En fait, cette amie femme me plaignait justement, alors qu’en fait, elle est complexée à mort et que j’ai bien + de succès avec les garçons qu’elle (bien que je ne le cherche pas) ! Encore une preuve que les gens qui se permettent de faire des remarques ont un problème, alors, raison de + de ne pas vous freiner à cause d’eux !
En réalité, depuis que j’ai arrêté, j’ai vraiment pris conscience de l’illégitimité de la rage dépilatoire, de son aspect arbitraire, et surtout, de l’absurdité de son caractère normatif alors que chacun devrait pouvoir disposer de son propre corps tel qu’il le souhaite. Je me suis aperçue qu’en réalité, l’épilation ne tenait justement qu’à son caractère normatif, car une fois franchi l’obstacle de la pression sociale, on n’a vraiment plus aucune raison de revenir en arrière. Ce qui m’a particulièrement révoltée, c’est de constater concrètement que les médias et les sexistes soumettent les femmes à une norme corporelle pour des raisons toutes plus mensongères les unes que les autres. Cette tromperie implique un investissement financier significatif, une perte de temps qui pourrait être consacré à des activités plus épanouissantes et enrichissantes (lecture, sorties entre amis, voyages…), des conséquences désastreuses sur les plans dermatologique, physiologique, gynécologique (pour les femmes qui s’épilent intégralement ou qui ôtent les poils des lèvres) mais également hygiénique et esthétique (est-il plus beau d’avoir des poils en repousse bien drus plutôt que de longs poils, ou d’avoir des poils incarnés ou des marques rouges à la place?), mais aussi, et c’est le pire, un sentiment d’insatisfaction vis-à-vis de soi-même en cas de non-soumission à la norme, la peur du regard des autres, et les moqueries des sexistes ou des femmes ayant elles-mêmes intériorisé la norme au lieu de se montrer solidaires. Justement, une norme de beauté (c’est mon cas en ce qui concerne le maquillage par exemple _mais malheureusement pas celui de la majorité des femmes à ce sujet) devrait nous donner l’impression que l’on est plus belle lorsqu’on la pratique, pas faire sentir autrui horribles lorsqu’on ne la pratique pas. Et la pensée unique rejoint l’absence de pensée à ce sujet: personne ne s’épile "car c’est plus beau ainsi", les femmes s’épilent clairement elles ne s’imaginent pas se montrer non-épilées.
Je pense, à votre instar, qu’est venu le temps de mettre fin à la supercherie. Il est tant que les femmes s’occupent de leur corps en connaissance de cause, et non par intériorisation de normes les soumettant au patriarcat. Vous allez sûrement trouver ce projet un peu fou, mais puisque j’ai toujours eu un penchant littéraire et engagé prononcé, j’aimerais rédiger un livre (ou essai) sur le sujet et tenter de le faire publier (si Wilkinson ou Nair ne tentent pas entre temps d’acheter mon silence!).
Je compte également publier quelques photos sur f*ck shaving, dont une en robe de soirée pour prouver que l’on peut être radieuse, attirante et poilue (ce que je constate tous les jours puisque je dois compter les jours ou personne ne me drague!). En me voyant tous les jours, tout en contemplant les photos de f*ck shaving (bien que j’aie du mal à trouver belles les filles couvertes de tatouages et de piercings), je me rends compte à quel point une femme qui conserve sa pilosité naturelle (sauf dans le cas de l’hirsutisme, peut-être _mais c’est une pathologie et on a encore moins de raisons de se moquer de la personne) ressemble si peu à la "femme singe qui pue qui pete" que s’imaginent les gens qui n’ont justement jamais vue de femme non-épilée. Je vous conseil vivement d’aller y jeter un œil
A ce sujet, je tiens à évoquer le fait qu’un de mes collègues de boulot justement pilophobe au possible qui avait tenu devant moi un discours patriarcal disant que les italiennes avaient une "pilosité de merde" sur les bras ("Scheissbehaarung" en allemand) a tenté de m’embrasser lorsqu’on dansait en boite (alors que je portais une robe sans manches et s’arrêtant au genou) samedi dernier.
Du coté de mes amies, certaines ont envisagé d’arrêter, et ça les conforte dans leur choix en me voyant !
Alors, vous qui partagez mes convictions, ne faites surtout pas comme moi : n’attendez pas une séance d’épilation désastreuse pour arrêter !
Ah oui, et PS : si un mec est suffisamment borné pour ne pas vous accepter si vous choisissez de ne plus vous épiler, larguez-le tout de suite, il n’en vaut pas la peine ! Et je dis ça par expérience personnelle et d’autres amies : s’il n’est pas capable d’accepter vos poils, il se montrera aussi un connard dans plein de domaines (ex : racisme, trop exigeant envers le physique de sa femme, volonté d’avoir raison sur tous les sujets, impatience, tromperie lorsque vous serez enceintes, etc…). Et puis, comme je l’ai dit, il peut y avoir une énorme différence entre la théorie et la pratique : il peut être repoussé à l’idée tout simplement car il ne sait pas à quoi peut ressembler une femme qui ne s’épile nulle part (cf le cliche de la femme-singe-qui-pue-qui-pete) , mais si vous lui demander d’essayer au moins de vous laisser ne pas vous épiler pendant 2 mois pour pouvoir juger en connaissance de cause (et s’il refuse, par pitié, LARGUEZ-LE, encore une preuve d’étroitesse d’esprit et de sexisme, vous valez mieux que ça !), je suis à 100% sure qu’il se rendra compte que finalement, vous n’en êtes pas moins belle dans votre naturalité, au contraire, ou que son amour ne s’arrête pas à des poils dans le cas où il vous préfèrerait toujours épilée. Dans le cas contraire, cela signifie tout simplement qu’il ne vous aime pas, donc justement, arborez vos poils : ils vous permettront dès le départ d’identifier les futurs-ex et donc à éviter une perte de temps supplémentaire !
Sur ce, bonne journée poilue à toutes !